Un feu à éclats ou stroboscope à fréquence réglable

L’appareil produit des éclairs brefs et intenses de lumière blanche à partir d’un tube en U au xénon de faible puissance. Il est idéal comme feu à éclats ou stroboscope pour l’animation lumineuse d’une petite salle. Les passionnés de photo pourront également s’en servir pour photographier des objets ou des sujets se déplaçant dans l’obscurité.

Bien que l’électronique ait fait d e s pas de géant dans toutes les directions et qu’elle nous fournisse quotidiennement de nouveaux dispositifs plus élaborés, miniaturisés à l’extrême, sophistiqués, afin que nous puissions réaliser tous ces appareils autrefois impensables, il existe encore des circuits qui, par leur simplicité spartiate, réussissent à capter l’attention et à réjouir l’électronicien amateur.
Parmi eux, le feu à éclat, ou stroboscope, fait figure de grand classique : quel amateur de sono n’a pas, dans sa folle jeunesse, utilisé ce montage simple permettant d’animer, de manière très remarquable, une soirée dansante ?
De tels circuits ont toujours fasciné les jeunes adeptes du fer à souder car ils mettent à la portée de leur savoir-faire et de leur bourse des accessoires de leur âge ! Certes, aujourd’hui leurs centres d’intérêt se sont peut-être un peu déplacés vers d’autres horizons et l’ordinateur polarise sans doute plus que jamais leur attention, mais nous croyons qu’un feu à éclat saura à nouveau les captiver.

Notre réalisation
C’est pourquoi nous avons pensé vous proposer un montage de ce genre, simple et facile à réaliser, même pour les plus novices d’entre vous, puisque la seule attention requise concerne la sécurité : en effet, s’agissant d’un appareil alimenté directement sur secteur 230 V et produisant une haute tension continue assez élevée, il faut prendre extrêmement garde de ne pas y mettre les mains !
Ce montage est principalement conçu pour produire des effets lumineux, à accompagner des lumières psychédéliques les plus diverses et les plus colorées.
Mais ce n’est pas tout : en effet, comme il s’agit d’un clignotant, notre circuit se prête également fort bien à la signalisation routière en cas d’accident ou simplement de panne, voire de bouchon ou autre désagrément de ce genre. Il peut aussi servir de signal visuel d’alarme, couplé à une sirène, au sein d’une installation antivol. Les applications des lampes stroboscopiques ne s’arrêtent pourtant pas là : dans le domaine de la photo les éclairs de lumière qu’elles émettent permettent les effets (spéciaux) les plus intéressants.
Si l’on photographie dans l’obscurité un objet, ou un sujet, en mouvement, tout en maintenant ouvert l’obturateur (position “pause B” de l’appareil photo) et si on met en fonctionnement le stroboscope, on obtient un photogramme composé des différentes positions prises par l’objet, ou le sujet, à chaque éclair du feu à éclats.
Vous comprenez donc bien que, malgré son apparente banalité, un stroboscope est en réalité un dispositif universel.

Figure 1 : Les ampoules au xénon.

Pour obtenir de forts éclairs de lumière, pour la production d’effets lumineux et pour réaliser des “flashs” photographiques, on utilise les fameuses ampoules au xénon : il s’agit de tubes de verre remplis de xénon, un gaz noble (numéro atomique 50) faisant partie du groupe 0 dans la classification périodique des éléments de Mendéléev.
Dans la nature il se forme spontanément par processus de fission naturelle d’uranium et de thorium dans la croûte terrestre. Ce gaz a pour caractéristique d’émettre une lumière bleue, très proche de celle du jour, quand il est ionisé (par ionisation, il faut entendre la rupture des liaisons électroniques des atomes sous l’effet d’un bombardement par une certaine quantité d’énergie). Cette énergie peut être fournie, par exemple, par un for t champ électrique, ce qui explique pourquoi les tubes au xénon ont besoin, en plus d’une tension de polarisation normale, d’un fort potentiel de déclenchement servant, justement, à provoquer la décharge dans le gaz.
Une fois l’ionisation déclenchée, l’arc électrique qui s’ensuit entre les deux électrodes des extrémités du tube dure tant que la tension de polarisation reste supérieure à la valeur de la tension de maintien.
C’est à cause de leur lumière naturelle et de l’intensité de leur éclat que les ampoules au xénon sont employées comme feux à éclats ou stroboscopes pour effets lumineux et pour une utilisation professionnelle : par exemple, dans les pistolets stroboscopiques utilisés par les garagistes pour le réglage de l’allumage des moteurs (pour cette application, les éclairs sont synchronisés avec les impulsions d’allumage des bougies et l’opérateur vérifie la position de la marque sur le volant magnétique afin de régler l’avance).
Mais on l’utilise aussi comme instrument de labo. L’extrême rapidité d’allumage, impossible à atteindre avec d’autres types d’ampoules (à incandescence, au néon, à vapeur de mercure…) rend le tube au xénon idéal pour réaliser des “flashs” photographiques.
Ces tubes ont récemment pris du service dans le domaine automobile : des versions à basse tension de travail équipent les projecteurs des grosses berlines. Les ampoules au xénon sont utilisées aussi en odontologie, pour effectuer la polymérisation des résines dont on fait les prothèses.

Le schéma électrique
Le schéma électrique de la figure 2 décrit mieux le circuit qu’un long discourset il en révèle l’extrême simplicité : le feu à éclat se compose surtout d’un tube en U au xénon, alimenté à ses extrémités par une haute tension continue (celle-là même où il ne faut pas mettre les doigts !) obtenue à partir de la tension alternative du secteur 230 V et dont l’allumage est déclenché par des impulsions à très haut potentiel, produites par un petit transformateur élévateur piloté à son tour par un triac.
Pour comprendre le principe de fonctionnement d’un circuit, même aussi simple que celui-ci, il faut tout d’abord expliquer ce qu’est un tube au xénon et comment on le met en oeuvre. Il s’agit d’un composant un peu spécial, une ampoule si l’on veut, mais sans aucun filament : ce n’est donc pas une lampe à incandescence mais plutôt à décharge dans un gaz. Physiquement, il se présente comme un tube de verre replié en U (dans notre cas) ou bien en spirale et rempli d’un gaz spécifique nommé xénon : cet élément naturel à l’état gazeux est dans le tube à la pression atmosphérique. Ionisé, il a le pouvoir d’émettre une lumière légèrement bleutée dont le spectre se rapproche beaucoup plus de la lumière du jour que ne le font les autres ampoules.
D’ailleurs ce n’est pas sans raison que de plus en plus de constructeurs de voitures montent des phares au xénon.
Pour ioniser ce gaz, il faut appliquer entre les deux électrodes extérieures du tube une décharge électrique : on l’obtient en soumettant l’ampoule à une forte différence de potentiel, appliquée entre l’électrode centrale (dite de déclenchement) et l’une des électrodes d’extrémités (en fait la plus proche du négatif d’alimentation). Cette différence de potentiel est de 6 à 7 kV.
Les composants que vous voyez sur le schéma électrique servent à faire ce que nous venons de dire. La tension continue devant alimenter le tube est obtenue en redressant le courant alternatif du secteur 230 V avec un pont de Graetz formé par les quatre diodes D1, D2, D3 et D4 : elles produisent des impulsions sinusoïdales d’une amplitude de 310 V, toutes de la même polarité, que le condensateur électrolytique C1 lisse afin d’obtenir un potentiel à peu près uniforme. L’ampoule reste éteinte tant que la décharge dans le gaz n’est pas déclenchée, soit tant que le transformateur L1 n’envoie pas à l’électrode centrale de déclenchement l’impulsion à haute tension. Cela arrive presque spontanément, sous l’effet du réseau R2/RV1/C2 qui, avec la complicité du diac, déclenche le triac TRI1 pour le faire conduire.
Voyons cela en détail : supposons qu’initialement C2 soit déchargé, les 310 V continus chargent cet électrolytique à travers le potentiomètre (monté en rhéostat) et R2. La rapidité de la charge dépend essentiellement de la position du curseur du potentiomètre. Quand la différence de potentiel aux extrémités de C2 dépasse la somme de la tension de seuil du diac (comprise entre 32 et 40 V) et du triac, les deux semi-conducteurs conduisent pleinement : TRI1 ferme C3 à la masse (C3 entretemps s’est chargé avec la moitié des 310 V à travers le pont R3/R4) en le déchargeant rapidement à travers l’enroulement primaire du transformateur élévateur. Par réaction, dans le secondaire de ce dernier, une tension beaucoup plus élevée, environ 6 kV, est induite. En fait, cette impulsion est très brève, mais elle suffit pour faire circuler un arc électrique à l’intérieur du tube : le gaz ionisé émet sa lumière claire et intense. Elle dure plus longtemps que l’impulsion car, une fois que l’ionisation est déclenchée, elle se maintient tant que la tension sur les électrodes externes du tube ne descend pas en dessous de la valeur de maintien : ce qui finit par arriver car le courant impliqué par la décharge dans le gaz est tel qu’il fait chuter la tension lissée par C1 au-dessous 100 V, cela aussi sous l’effet de R1 dont la valeur a été choisie de façon à produire une forte chute. L’arc électrique ne peut alors plus se maintenir et l’ampoule s’éteint (l’éclair se désamorce). Pendant ce temps C2, en se déchargeant, a fourni à la gâchette du triac une bonne partie de la charge accumulée entre ses armatures : après une brusque chute, la tension à la sortie du pont redresseur revient à sa valeur nominale de 310 V et C2 se recharge. Un phénomène répétitif s’instaure, dont la fréquence (et donc la cadence d’allumage/extinction du tube) dépend de la constante de temps de charge de l’électrolytique C2 : comme un seul composant est variable, le potentiomètre RV1, la fréquence du cycle de clignotement est justement déterminée par la valeur résistive qu’il prend, en pratique de 2 à 20 éclairs par seconde environ.

Figure 2 : Schéma électrique du feu à éclats ou stroboscope à fréquence réglable.

Liste des composants
R1 = 820 Ω 10 W
R2 = 100 kΩ
R3 = 100 kΩ
R4 = 100 kΩ
RV1 = 470 kΩ potentiomètre
C1 = 10 μF 350 V électrolytique
C2 = 10 μF 50 V électrolytique
C3 = 100 nF 250 V polyester
D1 = 1N4007
D2 = 1N4007
D3 = 1N4007
D4 = 1N4007
DI1 = diac DA3
TRI1 = triac BT136-600
L1 = self d’excitation HT ou transfo. élévateur
TUBE = ampoule au xénon

Divers :
2 picots


La réalisation pratique
Une fois que l’on a réalisé le circuit imprimé (la figure 3b en donne le dessin à l’échelle 1), ou qu’on se l’est procuré, on monte tous les composants dans un certain ordre en regardant fréquemment les figures 3a et 4 et la liste des composants.
Enfoncez et soudez tout d’abord, en haut à gauche, les deux picots de l’entrée secteur 230 V.
Montez les résistances, sauf R1 la grosse 10 W en céramique que vous monterez après, en la maintenant soulevée de quelques millimètres. Le potentiomètre sera également monté à la fin.
Montez les quatre diodes redresseuses du pont, bagues blanches repère-détrompeurs orientées dans le bon sens montré par la figure 3a. Montez le diac et le triac, pour ce dernier, semelle métallique orientée vers C1.
Montez les trois condensateurs en respectant bien la polarité des deux électrolytiques (la patte la plus longue est le +). Montez le transformateur élévateur L1, bien appuyé sur la surface du circuit imprimé et fixé par un point de colle à chaud ou silicone. Vous pouvez le construire vous-même en enroulant sur un petit noyau de ferrite de 15 x 15 x 5 mm 10 spires pour le primaire et 400 pour le secondaire (prenez du fil très fin émaillé et sous soie).
Vous pouvez maintenant monter la résistance R1 de 10 W en céramique et le potentiomètre RV1 permettant de régler la fréquence des éclats. Montez enfin (attention fragile, ne le touchez pas directement avec les doigts) le tube à éclats au xénon en faisant correspondre le point rouge avec le pôle +, en haut à droite.
Reliez le cordon secteur 230 V aux picots marqués “MAINS” (n’y mettez pas les vôtres, cela signifie SECTEUR en anglais) et passez aux essais.

Figure 3a : Schéma d’implantation des composants du stroboscope. Trois fois rien pour beaucoup de plaisir !

Figure 3b : Dessin, à l’échelle 1:1, du circuit imprimé du feu à éclats ou stroboscope vu côté soudures.

Figure 4 : Photo d’un des prototypes de la platine du feu à éclats ou stroboscope prête à l’utilisation.

Figure 5 : Pour augmenter l’efficacité de l’ampoule.

Afin d’améliorer l’efficacité du tube au xénon, placez derrière lui, à sa base, un réflecteur en V (miroir ou tôle réfléchissante) : bien sûr, pour ce faire, il faut ménager dans ce réflecteur un trou oblong pour le passage des trois pattes de l’ampoule en U.
Ce trou fera au moins 5 mm de large par 20 mm de long : les bords intérieurs seront à 2,5 mm au moins des pattes (sinon il y a des risques d’amorçage ou de court-circuit empêchant le circuit de fonctionner).
Le miroir est à fixer avec du mastic au silicone ou de la colle thermofusible, afin d’augmenter la rigidité diélectrique du montage.

Les essais
Avant de brancher le cordon à la prise, vérifiez que le triac ne touche aucun autre composant et que le transformateur est bien fixé. Placez la platine sur un matériau isolant, une table ou une plaque en plastique, en bois ou en verre (attention aux morceaux de fil fin métallique qui traînent !).
En effet, le tube est alimenté par la tension du secteur 230 V redressée (310 V) et son électrode centrale reçoit des impulsions de 6 kV.
Toutes précautions prises, insérez la fiche du cordon dans la prise secteur et en une fraction de seconde vous verrez l’ampoule émettre des éclats de lumière, accompagnés de claquements caractéristiques dus aux décharges électriques dans le gaz. Toujours sans toucher la carte avec les mains, tournez l’axe du potentiomètre pour augmenter ou diminuer la fréquence des éclairs.
Songez maintenant à protéger (à vous protéger plutôt) le montage en l’installant dans un petit boîtier plastique isolant d’où sortira l’axe du potentiomètre de réglage de la fréquence et, à travers un passe-fils en caoutchouc, le cordon secteur 230 V. Vous pouvez, si vous voulez, soit insérer un interrupteur olive dans ce cordon, soit monter en face avant un petit interrupteur en série sur l’un des fils du cordon.
Bien sûr l’un des panneaux du boîtier plastique doit être découpé pour laisser passer la lumière du tube à éclats : vous pouvez envisager de monter derrière un réflecteur, mais, dans ce cas, prenez bien garde de ne pas mettre en contact le matériau métallique de ce réflecteur avec l’une des trois électrodes du tube. Collez le réflecteur avec du silicone ou de la colle thermo-fusible, en vous aidant de ce matériau isolant pour bien isoler les trois électrodes, comme l’indique la figure 5.

Attention : après avoir débranché le cordon secteur 230 V ou éteint le circuit avec l’interrupteur M/A, la haute tension demeure quelque dix secondes, ainsi que la menace d’électrocution ! Alors attendez une minute avant d’intervenir à nouveau sur le circuit. En effet, C1 reste chargé un moment après que la tension du secteur redressée soit interrompue, tant que son énergie électrique n’a pas été dissipée par le pont R3/R4.
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